CONJONCTURE
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- Sommet européen sur la relance: acteurs, enjeux, blocages et chantages (REPERES)
BRUXELLES, 16 juil 2020 (AFP) - Les dirigeants des 27 pays de l'UE se
retrouvent vendredi à Bruxelles lors d'un sommet sous haute tension, crucial
pour la relance de l'économie du Vieux Continent, frappé de plein fouet par la
pandémie de coronavirus.
Les négociations s'annoncent longues et difficiles et ce sommet
extraordinaire de deux jours, voire trois, le premier en chair et en os depuis
février, pourrait ne pas être le dernier.
Acteurs, enjeux, blocages, chantage et menaces de veto à la veille du
sommet:
Merkel, Rutte, Michel...et les autres
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- Angela Merkel, dont le pays préside l'Union depuis le 1er juillet, sera à
la manoeuvre pour convaincre ses pairs de l'urgence d'adopter le plan d'aide
massif de 750 milliards d'euros, dont 500 milliards de subventions qui ne
seront pas remboursées par les Etats bénéficiaires. Il est adossé au budget
européen à long terme de 1.074 milliards d'euros.
Face à la crise, Angela Merkel a brisé un tabou en acceptant que des fonds
soient empruntés à grande échelle au nom de l'Europe, créant une dette commune.
"La présidence tournante n'a pas de rôle formel" mais "le poids personnel
de Merkel et celui de son pays rendent la situation particulière", reconnait un
diplomate européen.
Le plan de l'UE s'inspire d'une initiative franco-allemande proposant des
aides de 500 milliards d'euros pour les pays les plus touchés par le virus.
- Depuis le départ des Britanniques, le Premier ministre néerlandais Mark
Rutte fait figure de leader des Etats dits "frugaux" (Pays-Bas, Autriche,
Danemark, Suède, et dans une moindre mesure la Finlande).
S'ils ne contestent pas le principe d'une relance, ils ont soulevé de
multiples objections sur les modalités du plan de soutien.
Rutte, en partie responsable de l'échec du sommet budgétaire de février,
sera l'homme à convaincre. Plusieurs leaders ont fait le voyage à La Haye ces
derniers jours.
- Ce sommet sera un test pour le président du Conseil Charles Michel,
médiateur en chef de cette réunion. Il lui a été reproché en février de ne pas
avoir réussi à diviser les "frugaux" pour leur arracher un accord.
Enjeux, blocages, chantages et veto
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- La dette commune traduira une solidarité renforcée entre les pays les
plus fragiles et les plus forts et pour certains, un accord fera date sur le
chemin de la construction européenne.
Plus concrètement, soutenir les pays les plus touchés permettra de limiter
la fragmentation du marché unique de l'Union, l'un de ses principaux acquis.
- Pour parvenir à un accord, les 27 devront surmonter de multiples
obstacles. A commencer par le montant global du plan et celui du budget à long
terme (2021-2027) ou la répartition entre prêts et subventions.
Des "frugaux" font pression pour réduire la voilure du budget comme du plan
de relance, et préfèrent de loin les prêts remboursables aux subventions, ce
qui pourrait aboutir à la diminution de ces dernières.
Même vigilance de leur part sur le contrôle des plans de réforme qui
devront être présentés par les Etats pour obtenir l'argent. Un point dur de la
négociation.
Les pays du Sud, Italie et Espagne en tête, seraient les premiers
bénéficiaires de l'aide (plus de 172 milliards et 140 milliards respectivement)
mais ils sont aussi considérés par ceux du Nord comme les plus dispendieux.
"Des promesses de réforme, on en a déjà entendu", a raillé Mark Rutte,
évoquant des refontes des systèmes de retraite ou du marché du travail.
Les Pays-Bas ont placé la barre très haut en demandant que ces plans soient
validés à l'unanimité des 27 (et non à la majorité qualifiée comme prévu dans
la proposition de Charles Michel).
A ce petit jeu avant tout destiné aux opinions publiques nationales, les
pays du Sud ont leur carte à jouer, celle des rabais dont bénéficient les
"frugaux", en plus de l'Allemagne.
La suppression de ces rabais, qui permet aux Etats de réduire leur
contribution au budget européen, est réclamée par une vingtaine de pays, dont
la France, l'Italie et l'Espagne.
Autre question épineuse, le lien entre le versement d'argent et le respect
de l'Etat de droit, pour la première fois inscrit dans un budget. Il suscite
une levée de boucliers en Pologne comme en Hongrie, et Budapest agite la menace
d'un veto sur un plan qui doit être adopté à l'unanimité.AFP
MONDE
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- Données personnelles: l'accord UE-USA invalidé, victoire des défenseurs des libertés (PAPIER GENERAL-ACTUALISATION)
LUXEMBOURG, 16 juil 2020 (AFP) - Les défenseurs des libertés
individuelles ont crié victoire jeudi après l'invalidation par la justice
européenne d'un mécanisme crucial de transfert des données personnelles en
ligne entre l'UE et les Etats-Unis, jugé trop peu protecteur face aux
programmes de surveillance américains.
Cette décision, très attendue, va fragiliser les entreprises opérant dans
l'UE qui transfèrent ou font héberger des données outre-Atlantique, désormais
plongées dans un flou juridique.
Elle a été applaudie par le juriste autrichien Max Schrems, figure de la
lutte pour la protection des données, qui était à l'origine de l'affaire via
une plainte contre Facebook.
"Il semble que la Cour nous ait suivis sur tous les aspects", a réagi celui
qui s'était fait connaître en obtenant déjà la retentissante annulation, en
2015, d'un accord similaire entre l'UE et les Etats-Unis.
"Il est clair que les États-Unis devront modifier sérieusement leurs lois
de surveillance si les entreprises américaines veulent continuer à jouer un
rôle majeur sur le marché européen", a-t-il ajouté.
La Cour de justice de l'UE (CJUE) estime dans son arrêt que l'accord UE-USA
- baptisé "Privacy Shield" ("bouclier de protection", ndlr) - rend "possible
des ingérences dans les droits fondamentaux des personnes dont les données sont
transférées", car les autorités publiques américaines peuvent y avoir accès,
sans que cela ne soit limité "au strict nécessaire".
Elle souligne aussi que cette réglementation ne fournit pas "de garanties
pour les personnes non américaines potentiellement visées", ni ne leur propose
de "droits opposables aux autorités américaines devant les tribunaux".
- "Incertitude juridique" -
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"Cette décision crée une incertitude juridique pour les milliers de petites
et grandes entreprises des deux côtés de l'Atlantique", a déploré Alexandre
Roure, du CCIA, le lobby des géants de la tech à Bruxelles.
Le commissaire européen à la Justice, Didier Reynders, avait assuré avant
la décision que la Commission avait déjà préparé plusieurs "scénarios".
"En fonction du contenu de la décision, on verra quels sont les outils -
déjà préparés - à utiliser pour à la fois conforter les droits fondamentaux et
vérifier que la protection donnée par l'UE voyage avec les données", avait-il
expliqué à l'AFP.
"L'ambition est de réagir ensemble (...) du côté européen comme du côté
américain", avait-il assuré.
Les 5.000 entreprises américaines - dont 70% de PME - qui utilisent le
"Privacy Shield" pourraient rapidement se rabattre sur un autre mécanisme
permettant le transfert de données de l'UE vers le reste du monde: les "clauses
contractuelles type".
Il s'agit d'un modèle de contrat défini par la Commission européenne, que
toute entreprise peut utiliser pour exporter ses données, par exemple vers une
filiale, sa maison mère ou un tiers.
- "Défaite écrasante" -
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La CJUE a jugé jeudi ce mécanisme valide, mais rappelé que les autorités
chargées de la protection des données dans les pays de l'UE devaient suspendre
ou interdire les transferts si les lois du pays de destination ne sont pas
suffisamment protectrices.
Les données personnelles concernées (comportement en ligne,
géolocalisation...) constituent "la mine d'or" de l'économie numérique, en
particulier pour les géants comme Google, Facebook ou Amazon.
Mais une entreprise qui transfère des données d'un pays à l'autre entre ses
filiales, par exemple pour gérer la paye de ses employés, est aussi touchée.
L'eurodéputée néerlandaise Sophie in 't Veld (Renew) a salué "une victoire
pour la protection des données personnelles, mais une défaite écrasante pour la
Commission".
L'invalidation du "Privacy Shield" constitue un nouveau désaveu pour
Bruxelles après l'annulation mercredi de sa décision exigeant d'Apple le
remboursement de 13 milliards d'euros, jusqu'alors considérés comme des
avantages fiscaux indus.
A l'origine de l'affaire: une plainte de Max Schrems auprès du régulateur
irlandais, réclamant l'interruption du flux de données entre le siège européen
de Facebook, en Irlande, et sa maison-mère en Californie.
Raison invoquée: une fois aux Etats-Unis, ces données sont moins protégées,
car elles peuvent être réclamées par des agences de renseignement, comme la NSA
ou le FBI, sans recours, ni contrôle, comme l'ont montré les révélations du
lanceur d'alerte Edward Snowden.AFP
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- Coronavirus: quatre géants aux pieds d'argile (REPERES)
PARIS, 16 juil 2020 (AFP) - L'Inde, les Etats-Unis, le Brésil et
l'Afrique du Sud enregistrent actuellement les plus fortes hausses de cas de
Covid-19 depuis début juillet. Ces quatre géants économiques sont encore bien
loin d'avoir atteint le "pic" de la pandémie, selon les experts. Etat des
lieux.
Etats-Unis
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Les Etats-Unis, 328 millions d'habitants, sont en tête avec plus de 50.000
cas par jour depuis début juillet et déjà plus de 140.000 morts, soit 413 par
million d'habitants, selon les calculs de l'AFP à partir de données officielles.
Plus de 3,5 millions de cas ont été rapportés au total et quarante Etats
sur cinquante enregistrent des hausses. La Californie, premier Etat du pays à
imposer un confinement en mars, a décidé mardi de refermer bars, restaurants en
intérieur, cinémas, zoos...
Un premier pic est intervenu mi-avril, suivi d'un "plateau", avant une
nouvelle accélération à partir de la mi-juin. On considère donc que les
Etats-Unis restent au milieu d'une première vague.
Le virus entré par le nord-ouest et le nord-est descend désormais vers le
sud, le Midwest et l'ouest des Etats-Unis. Les Etats les plus touchés sont le
Texas, la Floride, l'Arizona et la Californie.
Comme en Inde, les experts estiment que ce pays fédéral a du mal à
combattre l'épidémie en raison de la réponse hétérogène qui y est apportée. Les
confinements ont été appliqués en "patchwork" et si New York semble désormais
épargnée, le virus s'est renforcé ailleurs.
Le président Donald Trump a "politisé" la science, suscitant des polémiques
autour du masque, qu'il a longtemps refusé de porter, et évoquant des complots
autour du Covid-19 visant à l'affaiblir. Des Etats épargnés se sont abstenus de
prendre des mesures, assouplissant le confinement, ce qui a relancé l'expansion
du virus.
Dans les Etats les plus touchés plus de 5% des personnes testées sont
atteintes, bien au-dessus des seuils recommandés par l'Organisation mondiale de
la Santé (OMS). A ce rythme, jusqu'à 40 millions de personnes pourraient être
infectées avant la fin d'année.
Brésil
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La première économie d'Amérique latine (209 millions d'habitants), dirigée
par Jair Bolsonaro depuis octobre 2018, s'approche des 2 millions de cas et
déjà plus de 70.000 décès.
Le taux de décès atteint 354 par million d'habitant, mais les spécialistes
estiment que le nombre réel de cas pourrait être jusqu'à dix fois supérieur et
celui de morts, aller jusqu'au double.
Les états amazoniens du nord, territoires de nombreux peuples indigènes aux
faibles défenses immunitairespour certains sont en première ligne. Et parmi
les 27 Etats brésiliens, Sao Paulo et Rio de Janeiro (sud-est) enregistrent, en
valeurs absolues, le plus grand nombre de contaminations. Rio de Janeiro, a un
taux de mortalité particulièrement élevé (665 par million d'habitants).
On observe une hausse dans les Etats du sud, jusque-là épargnés. "Je
n'arrive pas à visualiser un plateau réel", de la courbe, a déclaré le 10
juillet à l'AFP Domingos Alves, coordinateur du Laboratoire de recherche sur la
santé (LIS) de la Faculté de Médecine de Riberao Preto: "Le nombre de
contaminations va continuer à augmenter jusqu'en octobre-novembre, avec des
fluctuations", estime-t-il.
Le retard à prendre des mesures de prévention et le manque de tests ont été
aggravés par la politisation de la pandémie. Jair Bolsonaro, qui a lui même
contracté la maladie, a mené une campagne inlassable contre les gouverneurs
ayant imposé des mesures de confinement, au nom de la survie de l'économie.
Inde
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La cinquième économie mondiale, 1,3 milliard d'habitants, pourrait bientôt
dépasser le seuil du million de cas de Covid-19. Si le nombre de décès reste
très faible -- 17 par million d'habitants, comparé à 663 au Royaume Uni -- la
pandémie galope depuis début juillet ce qui l'inscrit dans cette liste des
quatre pays où elle progresse le plus vite.
Le gouvernement de Narenda Modi a décidé mardi de reconfiner près d'un
Indien sur dix, soit les 125 millions d'habitants du grand Etat du Bihar
(nord), où se trouve Bangalore, jusqu'au 31, après une levée du confinement en
juin.
Les Etats les plus touchés, sont le Maharashtra (ouest), où se trouve
Mumbai et ses fameux studios de Bollywood, le Tamil Nadu, au sud. La capitale
New Delhi concentre à elle seule plus d'un dixième des cas.
"Le pic de la vague reste à venir: selon mes prévisions, à la mi-août, mais
d'autres scientifiques évoquent les mois d'octobre, novembre ou décembre",
explique à l'AFP le virologue T. Jacob John. "De nombreuses raisons expliquent
(la flambée): tests trop peu nombreux, gestion très hétérogène par les Etats et
villes. Le manque de centralisation (des données) rend difficile de prévoir la
trajectoire du virus et l'épicentre change d'un Etat à l'autre", ajoute le
biologiste Samit Bhattacharyya, professeur à l'université privée de Shiv Nadar
University.
"La santé n'a jamais été une priorité politique en Inde", souligne T.
Jacob, évoquant un budget ne dépassant pas 2% du PIB."Culturellement, les
Indiens acceptent toutes les tragédie, et la mort, sans se plaindre. Le
confinement aura des conséquences économiques sévères et cela aussi, sera
accepté, avec stoïcisme".
Afrique du Sud
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La deuxième économie africaine après le Nigeria et ses quelque 58 millions
d'habitants enregistre une véritable flambée des cas, avec plus de 8.000 cas
par jour depuis début juillet, portant le total à plus de 300.000, selon les
données collectées par l'AFP de source officielle. On parle de... 500 cas par
heure!
Dimanche le président Cyril Ramaphosa a d'ailleurs souligné "la force et la
vitesse de progression", une source "de grande inquiétude". Il a réimposé un
couvre-feu et suspendu la vente d'alcool.
A la mi-juillet les provinces les plus touchées sont Gauteng, où se
trouvent Johannesburg, hub économique et financier, et la capitale Pretoria. Un
peu plus d'un tiers des cas s'y concentrent. La province du Cap-Occidental, si
prisée des touristes suit avec près de 30% des cas. Le KwaZulu-Natal, où le
patient zéro arrivé le 5 mars d'Italie a été identifié, concentre près de 10%
des cas.
"Nous observons une hausse très rapide à Johannesburg et anticipons que
cela va continuer encore pour plusieurs semaines", a déclaré à l'AFP
l'épidémiologiste Salim Abdool Karim, principal conseiller du gouvernement sur
le Covid. "A certains égards, Johannesburg est comme New York: densément
peuplée et la distanciation sociale est un défi".
"De petits groupes de personnes peuvent entraîner de vastes contagions et
c'est ce que nous observons". Le confinement décidé au démarrage a par ailleurs
freiné la progression du virus, mais restait "insoutenable sur le long terme,
d'un point de vie économique. Nous avons anticipé que nous serions obligé
d'alléger les mesures, mais il nous fallait du temps pour nous préparer",
a-t-il ajouté.AFP