BAMAKO, 11 juil 2020 (AFP) - La capitale du Mali affichait samedi les
stigmates de violences au lendemain d'emeutes considérées comme les plus graves
depuis des années, avec des barricades calcinées et des rues jonchées de
pierres, a constaté un journaliste de l'AFP.
Bamako a été secouée vendredi par une nouvelle manifestation contre le
président malien Ibrahim Boubacar Keïta qui a dégénéré, avec un bilan d'au
moins un mort et 20 blessés et des attaques d'édifices publics, dont
l'Assemblée nationale et le siège de la TV nationale.
Deux des principaux chefs de file de la contestation, Issa Kaou Djim et
Clément Dembélé, ont été interpellés, a rapporté le mouvement, dont certains
leaders ont explicitement donné le signal de la "désobéissance civile" vendredi
après-midi après le rassemblement de milliers de personnes anti-Keïta.
Des foules d'hommes ont attaqué l'Assemblée nationale, saccagant et pillant
les bureaux. Ils s'en sont pris aussi au siège de la télévision nationale,
autre symbole du pouvoir, qui a interrompu ses programmes.
Des membres des forces de sécurité ont ouvert le feu. Au moins une personne
a été tuée et vingt autres blessées, selon un responsable des urgences. Mais le
chef de l'Etat a lui-même signifié dans la nuit que le bilan humain et matériel
des évènements restait à établir.
La télévision nationale a depuis recommencé à émettre. Des dizaines
d'hommes des forces de sécurité se trouvaient dans sa cour samedi matin.
L'Assemblée a également été évacuée de tout manifestant samedi matin.
Les routes de Bamako étaient couvertes de cailloux et parsemées des restes
de barrages dressés la veille par les manifestants, ainsi que de carcasses
incendiées d'abris des policiers chargés du trafic.
Occupés jusque tard dans la nuit, deux des trois ponts reliant les deux
parties de la capitale par dessus le fleuve Niger, axes cruciaux de
circulation, ont été libérés.
Depuis juin, une coalition hétéroclite de chefs religieux, de personnalités
de la politique et la société civile a fait descendre dans les rues de la
capitale des milliers de personnes à trois reprises.
Mais les violences survenues vendredi sont les plus graves depuis le début
de ce mouvement qui canalise une multitude de mécontements: contre la
dégradation sécuritaire et l'incapacité à y faire face après des années de
violence, le marasme économique, la défaillance des services de l'Etat, ou
encore le discrédit répandu d'institutions suspectes de corruption.
Dans un message diffusé dans la nuit, le président Keïta a prôné fermeté et dialogue.